Créer des passerelles entre les gens
Dans une société atomisée, où des liens sont difficiles à tisser, où les lieux pour les créer se font rares, de vieux bastions comme les Maisons médicales résistent. Nées sous l’impulsion de mai 68, leurs fondateurs et fondatrices rêvaient d’un autre monde, plus égalitaire, solidaire et émancipateur. Ils et elles ont fait de l’utopie une réalité à leur échelle, non sans difficulté. Et c’est dans un de ces bastions liégeois, qui existe depuis 30 ans, que nous nous sommes déplacé.e.s, pour réaliser ce projet de roman photo.
Ce projet raconte et illustre comment il est possible de faire de la santé de chacun.e une priorité qualitative, et que les chemins pour y arriver ne sont pas essentiellement les soins thérapeutiques ou la dépendance vis-à-vis des soignants ou des médicaments. En effet, d’autres chemins peuvent être empruntés, où le paternalisme médical n’a pas sa place et où l’autonomie et l’émancipation des patient.e.s sont au centre des préoccupations. Aux besoins individuels, des réponses collectives sont apportées de manière pragmatique, sans doute. C’est à travers un cours d’aquagym à la piscine communale, un atelier cuisine ou l’installation d’une salle de sport que des liens commencent à se tisser entre des gens de toutes origines sociales et culturelles. Des gens qui se croisent et finissent par se mélanger et se sentir peut-être moins seuls… et moins malades.
Lors de cet atelier de création du roman graphique, nous avons également suscité le mélange socioculturel et « le public cible » n’était pas que les patient.e.s. Nous avions à cœur de mélanger la patientèle avec l’équipe. Parce qu’aujourd’hui, à l’heure du repli sur soi généralisé, l’éducation permanente ne concerne pas seulement les moins bien lotis socialement, économiquement et intellectuellement. Elle nous concerne tous et toutes.
Lors de ces ateliers, nous avons brainstormé sur nos vies, sur ce que nous faisions en maison médicale, ce qu’elle nous apportait en tant que patient.e ou travailleur/travailleuse, mais aussi sur ce que nous pouvions lui apporter. Nous nous sommes penchés sur son fonctionnement et sur les différents projets mis sur pied ou en gestation. Nous avons discuté de ses avantages et de ses inconvénients. Les histoires ont été créées en petits groupes à partir d’anecdotes racontées et de tranches de vie. Des photos ont été prises pour mettre en scène ces histoires, où la patientèle est devenue équipe et l’équipe patientèle. Puis les dessins ont été intégrés. Et c’est ainsi que ce roman photo est né.